Entretiens, entrechiens (4)

Publié le par Jazz

Une semaine après mon rendez-vous téléphonique avec l'agence n°2, arrive enfin le jour ô combien attendu de mon entretien, en personne, avec l'agence n°1, l’objet de mon désir professionnel à court et moyen termes.

L’agence n° 2 est déjà loin derrière moi. C’est tout au plus, un plan de secours au cas où l’agence n°1 ne serait pas, mais cela est fort peu probable, subjugué par mon incroyable parcours professionnel, ma personnalité attachante et mon potentiel phénoménal. Je suis une star, ils vont faire ma connaissance. ¤ application toute personnelle de la méthode Couet ¤

Le quartier est sympa, et en plus, c’est sur ma ligne. Je suis en avance, alors, je flâne un peu devant la vitrine d’un magasin de déco. Je me dis que je pourrais bien devenir une de leurs clientes régulières. Je viendrai chercher là les cadeaux pour les pots de départ. J’essaie tout de même de ne pas trop tirer de plans sur la comète, pas par superstition, mais plus parce qu’il faut faire les choses dans l’ordre : à trop se rêver président consultante senior, on finit par oublier qu’il faut passer le premier tour le premier entretien et on se retrouve vite à tirer des conclusions en se retirant de la vie politique active à la fin des élections du rendez-vous.

 

Une touche de gloss transparent sur les lèvres, et ca y est, il est l’heure.

Ding-dong, j’appuie sur la sonnette. Un homme ouvre la lourde porte. Je lui dis bonsoir en lui tendant la main.

Accueil polaire.
 je vous dis.
C’est tout juste s’il ne met pas un gant jetable triple épaisseur de latex pour la poignée de main pas molle, mais pas franche non plus. Il me regarde à peine, j’ai l’impression que mon coup de sonnette l’a interrompu dans une conversation télépathique au cours de laquelle sa bisaïeule morte allait lui révéler le secret de la vie éternelle. Je lui annonce quand même que j’ai rendez-vous avec Mademoiselle G. Toujours sans même me regarder, sans un sourire, il me demande d'attendre dans le couloir le temps que mon contact se libère car « elle est en train de finir un truc ». Vague excuse, d’habitude, on trouve quelque chose de plus chic comme : « elle termine sa conf’ call avec San Francisco et elle est à vous » ou « elle met la touche finale à la reco pour un gros prospect réseau », ou même « Mademoiselle G refait son vernis, elle porte une attention toute particulière à avoir une mise toujours impeccable, et ça demande du travail. » On dit tout sauf « elle fait un truc ». je prends donc place dans un fauteuil avec l’impression que je viens de tuer la mère de ce jeune homme et de faire fuir à tout jamais sa docte bisaïeule. Il est mal luné, ou super stressé, ou les deux me dis-je.

à suivre...

Publié dans tripalium delirium

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