Sous-régime
Mes hormones de travail me travaillent.
Mon chéri hier m’a dit : « mais tu fais une jolie carrière quand même ; à ton âge, regarde tout ce que tu as déjà fait… ». Bien tenté petit brun, c’est gentil et tout, mais moi, ça ne me va pas.
Je crève de n’avoir encore rien fait et plus ça va, plus j'ai la certitude que mon potentiel ¤ ce fabuleux univers des possibles autrefois si vaste et si dense ¤, contrairement aux piles Wonder, s’use si l’on ne s’en sert. Dans quelques années, je serai peut-être bien incapable de trouver mes mots.
La crise.
Horreur ultime.
Santé mentale anéantie.
Comment dit-on déjà ? A mince, voilà, ça commence.
Si ça continue comme ça, dans une demi-douzaine d'années, pas plus, je serai devenue la réplique ¤ en plus jolie quand même, laissez-moi au moins ça ¤ de mon ancienne chef et mentor en négatif , celle qui m’a appris tout ce qu’il ne fallait pas faire, qui ressortait toujours les mêmes fausses bonnes idées poussiéreuses nées dans les heures lointaines qui l’entendaient encore dire des choses sensées, ¤ à l'époque, Eddy Barclay ne devait pas encore avoir l'air vieux, c'est dire... ¤.
Tic.
Tac.
Tic.
Tac.
La trotteuse, impassible égoïste qui doit toujours être à l’heure et c’est tant pis pour les retardataires, continue ses tours de cadran et moi, je croupis ici, au point que je finis par sentir le moisi.
J’ai l’impression de m’épuiser à vouloir sortir le cou de la cangue et je m’essouffle.